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Échec de l’OPA sur Carrefour : Faut-il vendre ?

Caddies rangés en ligne
Mis à jour le 06 Juin. 2023 à 20h41

Il fut un temps ou Carrefour tentait de disputer la 1ère place dans le secteur de la distribution à l’américain Walmart. C’était il y a 20 ans.

Depuis, le groupe français ne caracole plus en tête du peloton, victime de certains choix stratégiques et dépassé au plan mondial par la concurrence américaine, championne de l’innovation et de l’offre « en ligne ».

Alors que le groupe est en pleine mutation, la crise sanitaire a permis à la grande distribution de retrouver une situation de « monopole » durant les confinements successifs, témoignant d’un certain redressement.

Stradoji revient sur la tentative d’acquisition amiable du Canadien « Couche-tard » sur Carrefour et sur les conséquences du véto français sur le titre…

Carrefour : un redressement en vue

Avec pour objectif de redevenir « un leader mondial de la distribution », Carrefour est entré dans une profonde mutation depuis l’arrivée de son nouveau Directeur Général, Alexandre Bompard en 2017.

Faisant évoluer son modèle économique en quittant les marchés où il n’était pas concurrentiel (Chine), mais en renforçant sa présence au Brésil ou en Espagne, tout en accélérant dans le bio et le partenariat avec l’agriculture française, Carrefour souhaite compter dans le paysage alimentaire français.

Le groupe a bénéficié de la conjoncture liée au confinement, réalisant au 3ème trimestre 2020, selon son PDG « sa meilleure progression de ventes depuis au moins 20 ans ».
Les confinements et le télétravail ont provoqué une hausse de la consommation de produits alimentaires, et par conséquent, Carrefour a plutôt bien résisté à la crise sanitaire.
Malgré la conjoncture qui a aussi généré de nombreux surcoûts logistiques, matériels, et de personnel ; son chiffre d’affaires au 1er semestre 2020 a progressé de 38 % et ses bénéfices de 63 %.

Pourtant, son modèle économique est mis en danger par les sites internet marchands, dont le géant Amazon. Et les principaux actionnaires du groupe ne cachent pas leur souhait de céder leurs parts pour se désengager à moindre frais :

  •  la famille Mouzin, propriétaire des Galeries Lafayette (enseigne particulièrement impactée par les conséquences économiques de la crise) qui détient 12,6% du capital ;
  • et le groupe LVMH (Bernard Arnault), avec ~6% des parts.

Manifestation d’intérêt du canadien Couche-Tard

Et il semblerait que le redressement de Carrefour, longtemps en difficulté, ait éveillé l’attention d’un concurrent étranger, qui profite de la conjoncture pour faire de nouvelles acquisitions.

Début janvier, Alain Bouchard, fondateur du groupe québécois « Couche-Tard » (ensemble de stations-services couplées à des magasins de proximité), qui rassemble plus de 9.300 magasins (ou « Dépanneurs ») en Amérique du Nord, et près de 2.700 points de vente en Europe (Scandinavie, Irlande, Pologne, Pays Baltes et Russie) a contacté Alexandre Bompard, pour évoquer un rachat amical.

Si l’entreprise canadienne est plus modeste que Carrefour en terme de chiffres d’affaires (59 milliards de $ vs 100 milliards de $), Couche-Tard pèse deux fois plus lourd que le groupe français en Bourse, qui en cas d’acquisition pourrait passer sous le giron canadien…

Le canadien Couche-tard propose 20 € par action Carrefour

Carrefour a entamé un cycle de baisse à la fin des années 90 : d’un plus haut de 84 €, le prix est entravé dans un canal baissier depuis cette période.

L’action a fortement rebondi en 2012 sur les 13 € pour reprendre un peu de hauteur jusqu’à 32 euros en 2015, mais la baisse a repris le dessus sans discontinuer.

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Graphique de l’action Carrefour en UT hebdomadaire en date du 19 janvier 2021 – On observe très clairement la formation dès 2015 d’un canal baissier long-terme, dont le point bas (~12,25€) a été touché au plus fort de la crise sanitaire du coronavirus en mars 2020. Le titre a perdu plus de 50% de sa valeur depuis son plus haut début 2015 (33,24€).

Depuis la mi-2016, en UT Hebdo, le graphique illustre le barrage infranchissable formé par la MM50, alors que la MM200 reste hors d’atteinte.

En 2020, la crise sanitaire et ses conséquences économiques font fléchir le prix jusqu’à ses plus bas, 12 €, touchés à 2 reprises en mars et mai.

Pour en savoir plus : Carrefour, Walmart : faut-il acheter la grande distribution ?

L’année 2020 finit sur variation du cours quasi-nulle, avec un titre flirtant aux alentours de 14,50€.

La proposition de Couche-Tard a provoqué une flambée du titre Carrefour le 13 janvier dernier de 13,42 %, provoquant un break du canal baissier et surtout le franchissement de la MM50 en UT hebdo.

La réaction haussière sur l’action jusqu’à 18,10 €, a permis à la valeur de corriger environ 25% de la baisse de 2015 à 2020, et de revenir sur des niveaux datant de 2019.

Le « patriotisme économique » à la française enraye la dynamique haussière

C’était sans compter l’intervention de l’État français qui voit d’un mauvais œil le premier employeur privé de France (~100.000 salariés), qui représente près de 20% de la distribution alimentaire, passer dans le giron d’un groupe canadien.

Pour s’opposer à cette OPA amiable, le gouvernement s’est appuyé sur un décret du 31 décembre 2019 portant sur le contrôle des investissements étrangers, qui lui permet de mettre son véto à des opérations de rachat dans certains secteurs. « La sécurité alimentaire est stratégique pour notre pays et donc on ne cède pas l’un des grands distributeurs français », a déclaré le ministre de l’Économie, Bruno Lemaire.

TWeet de Bruno Lemaire en date du 15 janvier 2021
Le 15 janvier 2021 – Réaction du ministre de l’Économie, Bruno Lemaire, sur le plateau sur RMC/BFMTV, au sujet de l’OPA amiable de l’entreprise Couche-tard sur le français Carrefour.

Les déclarations de Bercy ont ainsi fait fléchir de plus de 5% le cours sur les deux séances suivant l’annonce de la marque d’intérêt de Couche-Tard pour Carrefour.

Et l’opposition affichée du gouvernement français à un rapprochement a entraîné un mouvement violent de repli de 6,92%, provoquant un comblement du gap haussier qui s’était formé avant l’annonce de l’OPA amiable.

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Graphique de l’action Carrefour en UT daily en date du 19 janvier 2021 – Suite au plus bas de 2020 atteint en mars, aux alentours de 12€, une consolidation s’est formée entre 13€ et 15€, pour finalement breaker la résistance moyen-terme des 14,80€ en début d’année 2021. Un plus haut de 18,10€ a été touché suite aux annonces de l’OPA amiable de Couche-Tard..

Le mouvement spéculatif autour du titre s’est ainsi dégonflé avec un cours qui est retombé non loin des 15,46 euros.

Quelles perspectives pour le titre ?

Alors, faut-il se dépêcher de vendre le titre ?
L’arrêt des négociations ne provoque pour le moment pas de retour sur les plus bas de 2020 avec le dégonflement de la spéculation liée à cette opération de fusion/acquisition.
Les analystes estiment d’ailleurs que les discussions pourraient se poursuivre entre les deux entreprises pour déterminer d’éventuelles et futures opportunités de coopération.

Par ailleurs, l’offre de 20€ proposée à ce niveau par Couche-Tard est susceptible de soutenir la valorisation de Carrefour, qui pourrait profiter d’une bonne dynamique grâce aux efforts entrepris par le groupe. Et pourquoi pas susciter l’intérêt d’autres investisseurs.

En UT daily, la dynamique de rebond, avec un prix se stabilisant au-dessus des MM50 et 200, pourrait permettre à la valeur de revenir à nouveau vers les 20 €.

Par ailleurs, l’échec de cette OPA amiable étrangère donne l’occasion de revenir au scénario « plausible » de fusion entre Carrefour et son concurrent Casino.
Une alternative plausible, sous certaines conditions, pour valoriser des synergies complémentaires au niveau national et à l’étranger…

Il faudra surveiller les performances du groupe au quatrième trimestre, à l’occasion de la publication des résultats annuels le 18 février prochain.

Clemence CL
- Rédactrice financière
Historienne de formation, et férue d'économie et de géopolitique, j'ai intégré la Communauté d'EnBourse en 2017. Grâce aux formations et à l'accompagnement des coachs de la première édition d'Elite, je me suis lancée véritablement dans le trading. Adepte du swing trading, j'apprécie particulièrement le marché des matières premières et des indices, mais n'hésite pas à saisir les opportunités du marché actions et des cryptos !
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